« Mieux vivre avec un livre »
CERCLE DE LECTURE DU MARDI 24 SEPTEMBRE 2024
ROMANS
ARDONE Viola « LES MERVEILLES » Cl CH Albin-Michel (Italien) Août 24, 437p, 22,90 euros. Qu’est devenue sa mère quand, après quelques années d’école, la petite Elba revient à l’asile psychiatrique où son père avait fait enfermer sa femme et où elle était née ? On lui dit qu’elle est morte mais elle ne le croit pas…Elle décrit avec intelligence et humour l’enfer de l’asile. L’arrivée d’un nouveau médecin, le docteur Fausto Meraviglia en ouvre les portes, permet à l’adolescente de faire des études et de découvrir l’horrible vérité sur sa mère. La deuxième période du roman, une vingtaine d’années plus tard, vieux et solitaire, le docteur revient sur son passé : mauvais mari, mauvais père, soucieux seulement de son travail et de sa gloire ; Elba fut sans doute le meilleur de sa vie. Intéressant mais inégal. Niveau 1
BONNEFOY Miguel « Le rêve du jaguar » Payot-Rivages juin 2024 294 pages Josette Salvi « Au troisième jour de sa vie, Antonio Borjas Romero fut abandonné sur les marches d’une église dans une rue qui porte son nom. » Avec cette première phrase commence l’histoire de la famille de Miguel Bonnefoy le petit-fils d’Antonio. A Maracaibo au Venezuela, Antonio est recueilli et élevé par une mendiante muette. Il deviendra vendeur de cigarettes, domestique dans une maison close puis un des plus grands chirurgiens du pays. Il épousera Ana Maria la première femme médecin de la région. Accaparés par leur travail et profondément ancrés dans leur pays, ils ne verront pas que leur fille appelée pourtant Venezuela ne rêvera que de partir au loin. Et c’est le petit-fils qui fera le lien entre sa mère et ses grands-parents en revenant vivre à Maracaibo pour écrire leur histoire. Très belle saga familiale étroitement liée au destin du Venezuela. On y retrouve l’écriture sud-américaine ponctuée de pensée magique et de révolutions. Un plaisir de lecture ! Niveau 1. Sélection Renaudot, Fémina, Médicis.
BORNE Adrien « L’Île du là-haut » J.C Lattès, 8/2024, 276p, 20,90€ (Milène THONY) Marcel, 15 ans, n’a jamais vu son père, il est élevé par sa mère. Marcel est tuberculeux, il tousse, a de la fièvre, crache du sang. Il doit aller se faire soigner au Sanatorium de plateau d’Assy, près de Chamonix. Trois semaines d’isolement forcé. Les médecins sont réservés sur sa survie. Il tombera amoureux de la jolie Valentine qui peint Notre
Dame des Neiges sur les murs de la crypte. On opère Marcel pour lui mettre
un poumon au repos. Guérira-t-il ? Un résident excentrique, Scala, offrait une promesse d’éternité à ceux que personne ne venait voir. Après leur décès, il prenait l’empreinte de leurs visages avec de la cire. Et conservait les masques de cire dans une vitrine. Très beau roman poignant. Par l’auteur de « Mémoires de soie » Niv 1
CANESI Michel et RAHMANI Jamil « ULTIME PREUVE D’AMOUR », Ed Anne Carrière 01/20, 272 p, 18,50 € (Gilles KRIKORIAN) Pierre et Inès sont amoureux l’un de l’autre, mais aussi de leur ville, Alger, où ils ont grandi ensemble. Ils ont le même rêve celui de devenir médecin. Cependant, cette belle image d’Épinal est menacée par la guerre d’Algérie. Lors de la proclamation de l’indépendance du pays, ils doivent se séparer, car Pierre est français et Inès algérienne. 34 ans plus tard, le destin va les réunir. Mais est-ce bien seulement le fruit de la providence ? Un magnifique et vibrant témoignage d’amour au travers de 3 histoires : celle d’Inès et Pierre, celle d’Inès pour l’Algérie Algérienne et celle de Pierre pour l’Algérie Française. On reste captivé à l’évocation de la ville blanche. Niveau 1. À acheter.
CHEVALIER, Tracy- « La Fileuse de perle » – Ed Table ronde- 05/24- 442p. 24,80€- Annette FAVIER. Après ses livres précédents, « La jeune fille à la perle », « La dernière fugitive », l’auteur nous donne un livre qui nous transporte de 1486 à nos jours, dans le monde passionnant de la verrerie de Murano. Là son héroïne Orsola, travaille comme les hommes mais dans le domaine de la perle irisée, une tâche plus que difficile dans la confection et la vente à Venise. C’est une très belle lecture de chaque époque qu’elle relate, sans que ces sauts dans l’histoire ne soient gênants, les personnages de son épopée familiale étant tous attachants. Un style fluide mais peut-être un peu trop de descriptions à reprocher à l’auteur ??
CHEVALIER Tracy « La fileuse de verre », Éditions de La Table Ronde, trad. de l’anglais par Anouk Neuhoff, 5/24, 448 p., 24,80 € (Barbara MARTINEC) Très agréable à lire, ce roman se passe du XVe au XXIe siècle à Murano, l’île vénitienne connue pour ses artisans travaillant le verre. En suivant le destin d’Orsola, une jeune femme qui exercera ce métier réservé aux hommes, le lecteur plonge dans le quotidien de la famille d’Orsola et l’évolution que connaîtront les ateliers de verriers avec les chamboulements de l’Histoire. La narration est fluide, tout à fait équilibrée entre la description des personnages, de l’atmosphère et des moments historiques. NIVEAU 1. À ACHETER.
COLLETTE Sandrine « Madelaine avant l’aube » J.C Lattès 252 pages. Josette Salvi. Il y a bien longtemps, aux Montées vivent ou plutôt survivent trois familles, la vieille Rose la guérisseuse avec Bran, les jumelles Aelis et Ambre belles comme le jour et leur mari Eugène et Léon. Aelis a eu trois fils mais Ambre n’a jamais enfanté. La vie s’écoule durement au fil des saisons et des caprices de la nature, entre le froid et la faim et sous le joug des seigneurs les Ambroisie. Et puis un jour, sortie de la forêt, Madelaine va s’ancrer aux Montées et tout bouleverser. Elle apporte de l’amour mais aussi son côté sauvage et son insoumission. Jusqu’au drame…A l’image de la vie aux Montées, l’écriture de Sandrine Collette est âpre, tourmentée mais pleine de poésie quand elle décrit la nature et d’émotion quand surgit un moment de fugace bonheur. Coup de cœur de cette rentrée littéraire ! Sélection Goncourt, Goncourt des Lycéens.
COLLETTE Sandrine « Madelaine avant l’aube » (Milène THONY) « Nous n’avons pas le droit de sortir de notre village. Nous appartenons aux Seigneur d’Ambroisie dont le fils, fou, chasse et viole les femmes. Quand un enfant nait qui ressemble au fils, la famille le tue. Nous vivons pauvrement, nous subsistons. Notre faim est immense pendant les années de disette, nous mélangeons de la farine de bois à la soupe…Nous avons une vie trop rude qui nous met trop souvent à l’épreuve, alors quand l’un de nous peut devenir un maître plutôt qu’un gueux, quand il se trouve un morceau de pouvoir, il n’hésite pas. » Cruelle fable noire. Trop noire.
CUMMINS, Jeanine, – « La Branche tordue » – ED Ph. Rey- 440 P.- 05/24- Annette Favier Être mère n’est pas inné. Notre héroïne Majella en sait quelque chose, elle qui vient de donner naissance à son premier enfant désiré. Épuisée, elle range un jour le grenier de son enfance et découvre un journal qui semble bien vieux, un nom « Jimmy ». Son histoire familiale est à la clé : son aïeule irlandaise raconte qu’en 1848 sa famille soufre de la faim suite au désastre de la pomme de terre. Son mari part en Amérique pour chercher du travail, la laissant seule avec ses quatre enfants. Que va-t-elle faire ? Suspense et descriptions de l’Irlande rendent ce livre très attractif. Impossible de le lâcher ! Volontairement je ne donne aucun détail sur la suite du livre !! Peut-être ai-je tort ? Les lecteurs nous diront !!
CUMMINS Jeanine « La branche tordue » (Céline DOEBBELS) Romancière américaine née en 1974. C’est son 3éme roman qu’elle a écrit avant American Dirt. Traduit par Christine Auché. 440 pages. En parallèle,
2 vies de mère. Une, en Irlande, au temps de la grande famine, au milieu du XIXème siècle. Mère-courage, 5 enfants, qui ira jusqu’au pire pour sauver ses enfants. Elle émigrera aux États-Unis et sera l’aïeule de Majella, de nos jours, new-yorkaise, jeune mariée, tout pour être heureuse, qui met au monde son 1er enfant, Emma. Rien ne manque dans notre monde, tout est à notre disposition. Et pourtant, Majella a des difficultés à faire émerger en elle le sentiment maternel. Il viendra. Sommes-nous trop gâtés ? Comme avec American Dirt, Jeanine Cummins aborde des faits sociétaux et nous met face à ce que, parfois, nous oublions : l’immense confort matériel dans lequel nous vivons.
DAOUD, Kamel- « Houris » – Ed Gallimard-06/24-412 p. 23 € Annette FAVIER. Elle s’appelle FAJ, « AUBE » en français. Dans son enfance, elle a échappé à un massacre lors de la guerre civile qui ravagea 10 ans l’Algérie. Elle en garde une plaie ouverte, une canule pour respirer et des cordes vocales très abîmées. Elle porte un enfant qu’elle nomme « houri », nom des vierges promises par le Coran aux fidèles au Paradis. À
Oran, Aube a tenu un salon de coiffure ravagé par « les barbus » maintenant. Elle décide de retourner dans son village natal, là où tout a débuté et où peut-être les morts répondront à ses questions. Et c’est un voyage mouvementé qu’elle entame avec Aïssa, son chauffeur de taxi,
rescapé lui aussi, et ayant bien des horreurs à raconter … Ce roman est un long (très long..) roman polyphonique, désordonné, plein de disgressions, comme un oued en crue. Fascinant mais dur à suivre. Sélection Goncourt, Renaudot, Goncourt des Lycéens.
DELFINO Jean-Paul « L’AFFRANCHIE DE MONTMARTRE » Cl Ch. Istya & Cie, Août 24,251p,22 euros. 1938, Suzanne Valadon, septuagénaire, vit ses derniers jours et se souvient… Femme libre : dès l’adolescence elle abandonna les petits métiers de la butte pour devenir modèle nu ; libre elle devint femme peintre ; libre, elle refusa le « joli » pour peindre le réel et le laid. Une épine dans son cours, son fils, Maurice Utrillo, alcoolique dépressif et violent qui eut plus de succès que sa mère en peignant des vues de Montmartre d’après carte postale et que son épouse retient loin d’elle. Intéressant, à acheter Niveau 1.
DELFINO Jean-Paul « L’affranchie de Montmartre » Istya & Cie 251 pages, Josette Salvi. L’affranchie de Montmartre c’est Suzanne Valadon. Au soir de sa vie, dans les années 1930 elle se raconte à un journaliste qui veut écrire son histoire. Née d’une mère illettrée et d’un père inconnu dans un milieu très pauvre, pour survivre elle deviendra écuyère, dans un cirque, blanchisseuse puis modèle de très grands peintres comme Toulouse Lautrec, Renoir, Puvis de Chavanne. Sa rencontre avec Degas qui va devenir
son mentor va lui permettre de passer de statut de modèle à celui d’artiste. En tant que femme elle se battra longtemps pour faire reconnaître sa singularité et son talent à une époque où l’on n’imaginait pas qu’une femme puisse tenir un pinceau ! Femme indépendante, elle vivra pour son art au point de délaisser son fils Maurice Utrillo avec qui elle se brouillera.
Magnifique portrait d’une femme libre, courageuse, toujours en proie avec ses démons. Ce roman donne envie de se plonger dans ses magnifiques tableaux où « elle ne peignait pas le beau mais le vrai » Niveau 1
FAYE, Gaël – « JACARANDA » -Ed Grasset – 0/24- 282 p. 20,90€ Annette FAVIER. MILAN, enfant unique, vit calmement avec des parents bien établis. Sa mère est noire mais on ne parle jamais de son passé et elle y tient. Mais un jour apparait dans leur existence un garçon, CLAUDE, qu’on lui dit venir du Rwanda. IL porte un impressionnant pansement. MILAN est heureux d’avoir comme un frère et CLAUDE idem. Mais un jour ce dernier est rappelé par sa mère au RWANDA, un pays dont Milan n’avait jamais entendu parler. Devenu majeur, poussé par le désir de revoir Claude, il part pour le Rwanda. Ce sera un voyage qui le plongera dans l’histoire du pays, de ses ethnies TUTSI et HUTU, de leur guerre fratricide aboutissant à un génocide affreux. MILAN va retrouver une grand’mère, une amie de sa mère et sa fille, et des amis tous différents et pleins de secrets. Ce livre pudique et efficace sait rendre toute l’histoire du RWANDA. Vraiment à découvrir et écrit avec tant de justesse ! Sélection Goncourt, Renaudot, Fémina.
FERRARI Jérôme « NORD SENTINELLE » Cl Ch., Actes Sud, Août 24 137 p, 17 euros. Une banale altercation qui finit mal entre un restaurateur local et un client « du continent » débouche sur une critique au vitriol du tourisme : il défigure le pays, altère l’âme des autochtones complices du carnage par appât du gain. Réaliste, violent, un humour noir et désespéré. À acheter niveau 2
GALLAY, Claudie- « Les Jardins de Torcello » -Ed Actes Sud- 08/24- 404p- 23€ Annette FAVIER. JESS, le personnage central du livre, est une jeune femme éprise de liberté. Elle décide de partir à Venise où elle a la chance d’avoir un appartement prêté, vivotant de visites guidées originales qu’elle propose en ligne. Elle trouve un travail d’appoint chez un avocat fameux qui habite une propriété au charme suranné sur l’île de TORCELLO, avec son petit ami COLIN. Entre deux procès, il cherche à reconstituer les jardins qui entourent sa propriété, plantant toutes sortes d’herbes, de fleurs, de vignes. JESS s’occupe de la maison, et du classement des nombreuse affaires de MAXENCE. Le roman est tout entier axé sur leurs
travaux à l’un et à l’autre. L’auteur en profite pour nous initier au charme de Venise et bien sûr de TORCELLO. Mais il faut reconnaitre que malgré une écriture aux phrases très courtes, au style très facile à déchiffrer, l’auteur aurait pu essayer de faire plus court. Pensons aux lecteurs qui, de plus en plus, sont rebutés par ces nouvelles parutions !!
GALLAY Claudie « Les Jardins de Torcello » (Milène THONY) La lagune de Venise contient 118 îles. Torcello est la dernière île de la lagune, à 40mn de Venise en vaporetto. Quelques maisons, une basilique, des marais et beaucoup d’oiseaux, des hérons, des cormorans, un monde à part. Dans le roman, Maxence veut redonner à sa propriété l’apparence qu’elle avait avant, puisque c’était un monastère avec un pigeonnier, un vignoble, un verger, un potager et un carré de simples. Sept jardins différents ! Et Maxence veut surtout protéger sa propriété de la montée des eaux. Et il est prêt à y mettre une fortune. J’ai adoré ce roman.
GUEZ Olivier « Mésopotamia » En 2018, Olivier Guez a reçu le prix Renaudot pour « la disparition de Joseph Mengele ». Édité chez Grasset. 406 pages. (Céline DOEBBELS) Mésopotamia raconte l’épopée de Gertrude Bell née en 1868, décédée en 1926. Archéologue, exploratrice, espionne, aventurière, anglaise, amie de Lawrence d’Arabie. Ce dernier ouvrage d’Olivier Guez va bien au-delà d’une biographie. C’est une étude géopolitique, riche, extrêmement documentée du Moyen Orient dans cet après empire ottoman, avec la montée de la famille Ibn Saoud et celle du cheik Hussein dont les descendants sont la famille royale de Jordanie. À lire pour mieux comprendre les enjeux actuels. Livre important lors de cette rentrée. Lire aussi pour les bibliothèques qui la possède, la biographie de Gertrude Bell parue en 2017 et écrite par Christel Mouchard.
HUNZINGER Claudie « Il neige sur le pianiste » Grasset, 8/2024, 215p, 20€. Après avoir réussi à presque apprivoiser un renard sauvage en lui déposant de la nourriture tous les soirs devant la façade en verre de sa maison, l’auteur va séquestrer pendant 15 jours, un jeune pianiste de réputation internationale, qui lui avait dit un jour « j’aimerais pouvoir venir vous voir dans votre forêt » Il était venu et n’avait pu repartir à cause de la neige tombée toute la nuit. Il y avait un Steinway dans le grenier et il pouvait répéter ses concertos. Il était jeune, un peu ahuri, mystérieux. Le bonheur. Elle nourrit son captif, se balade avec lui en forêt, l’observe la nuit en cachette sans oser le toucher. Un bonheur et un délice de lecture. Niv 1
HWANG Bo-reum « Bienvenue à la librairie Hyunam », trad. du coréen par Hyonhee Lee et Isabelle Ribadeau Dumas, Éditions Picquier, 8/24, 347 p., 22 € (Barbara MARTINEC) Premier roman d’une jeune Coréenne, sans grand intérêt. On n’y a vu aucun effort de style, et les sujets banals – tels que : solitude, passage à l’âge adulte, monde du travail, les critères de réussite sociale, rôle du mariage dans la vie d’une femme/d’un homme – débouchent sur la question centrale, qui est de savoir comment atteindre le bonheur. La seule originalité : on y raconte les 2-3 premières années de vie d’une librairie indépendante (à quoi se grefferont l’art de préparation du café et les bienfaits de la méditation). Trop naïf.
Niveau 1. Achat à éviter.
JAENADA Philippe « La Désinvolture est une bien belle chose » Mialet-Barrault. 8/2024, 486p, 22€ (Milène THONY) Pourquoi en 1953, à Paris, Jacqueline HARISPE, dite Kaki, belle jeune femme de 20 ans, s’est jetée par la fenêtre d’un hôtel minable du quartier latin où elle vivait avec un jeune américain ? L’auteur, minutieusement, avec l’aide d’archives, va reconstituer la vie d’une jeunesse en rupture de ban, des jeunes nés entre 1932 et 35, qui avaient 10 ans pendant l’Occupation. Toute la bande de Kaki se retrouvait au Bistrot Moineau, fréquenté par Guy Debord. Ces très jeunes gens passaient leurs journées à traîner, boire, rêver, s’aimer. Les parents de certains avaient été collabos, d’autres partis à Auschwitz. L’existence de tous était principalement caractérisée par une prodigieuse inactivité !!! Il leur arrivait de dormir au bistrot. A l’époque où la majorité était fixée à 21 ans, les mineurs rétifs étaient envoyés en Maison de Redressement. Ou dans des couvents lorsque les jeunes filles menaient des vies dissolues. Ce que fit la grand-mère qui s’occupait de Kaki depuis la mort de ses parents. Certains iront en prison, pour seul crime de ne pas avoir obéi. Kaki, rétive et farouche est incarcérée à Fresne, à 16 ans, comme une criminelle ! NB ( Pour aérer son écriture, l’auteur a pris le parti de faire le Tour de France par les côtes et de raconter ce qu’il voit) Extraordinaire enquête sur J.HARISPE, d’une obsessionnelle précision. Sélection Goncourt, Renaudot, Goncourt des Lycéens.
KERANGAL Maylis de « JOUR DE RESSAC » Cl Ch, Verticales, Août 24, 245 p, 21 euros. Un cadavre sur la plage, serrant dans sa main le numéro de téléphone de la narratrice sur un ticket de cinéma, la ramène dans la ville de son enfance et de son premier amour. Une ode au Havre, ville martyre reconstruite et porte océane. À acheter, niveau 1. Sélection Goncourt, Goncourt des Lycéens.
KERANGAL Maylis de « Jour de ressac » (Milène THONY) L’auteur dit : Le Havre me paraît une ville hantée : il y avait une autre ville avant
les immeubles en béton de PERRET. Avec une amie, nous avons enregistré les récits des témoins de l’époque. C’est mon livre le plus intime. Mon personnage est un peu mon double. Bon roman attachant. Niv 1
KHADRA, Yasmina- « Cœur d’amande » – Ed Mialet-08/24-313 p 21€ Annette FAVIER. Le héros de KHADRA est cette fois-ci un gentil nain qui vit avec sa grand’mère qu’il adore, sa mère l’ayant abandonné dès sa naissance. Dans le quartier de la Butte Montmartre tout le monde le connaît et son naturel le fait aimer de tous. Mais jusqu’au jour où Mme CAHUSAC, sa mère biologique, apprenant que la grand’mère commence la maladie d’Alzheimer, la fait prendre en charge et s’empare de leur maison, NESS, notre héros, étant mis à la porte.IL va affronter avec courage des épreuves successives, car il a commencé à écrire un livre. Mais lequel ? Aura-t-il du succès ? Livre facile à lire, portrait bien évoqué de chacun des protagonistes.
LARMER C.A « ET ILS NE FURENT PLUS QUE 9 » Cl CH, Cherche Midi Anglais (Australie)Août 24,377 p. Le club des amateurs de romans policiers se réunit dans un hôtel désert perdu dans la forêt australienne ? Un mort, puis deux, l’angoisse monte, exacerbée par l’incendie qui cerne la demeure. Très lent au début, s’anime au long des pages mais reste très ennuyeux…….
LEGER Nina « Mémoires sauvées de l’eau » Gallimard 315 p.21,50€ (Josette SALVI) 1850 : nord de la Californie, peuplée d’Indiens. Un européen découvre de l’or dans la rivière Feather. Début de la ruée vers l’or, encouragée par le gouvernement pour augmenter le peuplement blanc et rattacher la Californie comme État création d’Oroville, extermination des indiens. Histoire d’Ishi et de Koebler, anthropologue, puis de Thea, arrière petite-fille de Koebler (2017) Nombreux barrages dont un sur la Feather River pour amener de l’eau dans toute la Californie. 2023 : lac immense, inondations à la fonte des neiges créant un nouveau sport le « sand bagging » et entrainant des coulées d’or ! À nouveau ruée vers l’or sur la Feather…le matériel est fourni par Amazone … Récit passionnant, documentation très précise, certain humour, mais avec une construction un peu compliquée et des développements pas toujours justifiés.
LEON Dona « LE PALAIS DE L’INFORTUNE » Cl Ch. Calmann-Lévy, Anglais, Août 24, 330p, 22,50 euros. 1/4 Venise et ses gondoles,1/4 la vie familiale de Brunetti, 1/4 l’ambiance du commissariat ; reste 1/4 pour une intrigue ténue : un chien déterre un bout d’os humain qui ramène à un crime vieux de 20 ans. C’est cher payé mais sera demandé.
LIGHIERI Rebecca « Le club des enfants perdus », P.O.L, 8/24, 515 p., 22 € (Barbara MARTINEC) Situé dans le monde de théâtre et le monde invisible de la magie, ce roman brasse trop de sujets : parentalité, jeunesse tourmentée, abus de drogues et de sexe, pouvoirs paranormaux, détresse mentale, injustices sociales, éco-anxiété. L’auteure a un style bien à elle, mais sa langue est parfois trop crue. Le monde qu’elle construit est particulier, les déviances comportementales trop exagérées – dans quel but ? Son personnage de la jeune Miranda est porteur de tous les malheurs du monde, ce qui la mènera au suicide – l’auteure semble fascinée par Kurt Cobain, Amy Winehouse…, autant que par Alice dans le pays des merveilles. Trop occulte pour nos bibliothèques. Achat à éviter.
MC FADDEN Freida « LA FEMME DE MÉNAGE » Ed. J’ai lu, 09/23, 411 p, 8,60€ (Gilles KRIKORIAN). Millie est une jeune fille qui postule comme femme de ménage chez les Winchester, un couple aisé avec un enfant vivant dans un quartier chic de Long Island. Elle est embauchée par Nina Winchester qui malgré son attitude amène laisse une impression étrange à Millie. Par contre, elle tombe immédiatement sous le charme d’Andrew Winchester, le mari de Nina. Mais qui cache quoi dans cette relation triangulaire ? Machiavélique ! Thriller psychologique raconté à deux voix. Le caractère et le comportement des personnages sont adroitement développés. L’autrice a l’art de ménager les effets de surprise pour susciter toute notre attention. Niveau 1.
NOTHOMB, Amélie- « L’Impossible retour » – Ed Albin Michel 05/24-158 p-18,90€- Annette FAVIER. L’humour et l’autodérision n’ont pas quitté l’auteur ! Celle-ci se voit proposer par sa meilleure amie de partir avec elle au Japon, grâce à un voyage gagné. Cette amie l’a persuadé de partir avec elle qui aime tant ce pays et en maîtrise à peu près la langue. UN voyage décrivant aussi bien les habitants que leurs mœurs, leurs habitudes et surtout les paysages, les pagodes que nos deux voyageuses adorent et devant lesquels elles se pâment ! Bref, nous n’avons qu’une envie, partir comme elles ! À acheter, facile à lire, drôle par moments et plein, bien sûr, de la nostalgie particulière toujours à l’auteur !
NOTHOMB Amélie « L’IMPOSSIBLE RETOUR » Cl Ch. Albin Michel, Août 24 157 p, 18,90 euros. De nouveau Amélie et le Japon ! Elle lui a été arrachée à l’âge de 5 ans et ne s’en est jamais remise. Un court séjour dont la description ressemble à une notice touristique (ses temples, ses palais, sa gastronomie, ses codes sociaux) lui confirme qu’elle ne pourra jamais y revenir. Spirituel et nombriliste, niveau 1
NOTHOMB Amélie « L’Impossible retour » (Milène THONY) J’ai passé ma vie à partir. Mes parents diplomates déménageaient sans cesse, emmenant une progéniture plus traumatisée à chaque fois. Mon père, ce héros qui avait sauvé plus de 1.000 vies humaines, ce fin diplomate, ce chanteur de nô, cet homme d’une culture effarante, se tenait pour un zéro pointé et m’attribuait la même note. D’où pouvait venir pareille déconsidération ? Un jour il m’avait hurlé que j’étais comme lui, que je n’étais rien. Mon amour pour le Japon est profond mais je ne me sens pas capable d’y vivre. J’ai beaucoup aimé ce dernier livre.
PALAIN Mathieu- « Les hommes manquent de courage » 8/2024, Ed. L’Iconoclaste, C QUARELLI. À partir d’une histoire vraie. Contacté sur FACEBOOK l’auteur a rencontré durant un an la femme qui lui a fait le récit de sa vie, Jessie est professeur de mathématiques, elle a 43 ans et 2 enfants. Mais avec son fils Marco rien ne va plus. IL se comporte mal à l’école, trop d’absences, fume de la drogue et veut se faire émanciper. De plus il a écopé d’une IP à savoir une « information préoccupante » déclenchée par son établissement ce qui peut valoir une visite des services sociaux……. Jessie est à bout d’autant que Marco a fugué depuis 3 jours…Une nuit Marco appelle sa mère : il faut qu’elle vienne tout de suite, il est à une fête avec Jade sa copine. Jessie fonce dans la nuit au volant de son Nissan et récupère son fils et la copine. Et c’est dans la voiture, après avoir déposé Jade que son fils se met à pleurer …il avoue à sa mère qu’il s’est très mal conduit avec Jade…et dans la nuit sa mère lui raconte ….
L’écriture est belle, dynamique ; moderne ; les retours passé présent captent l’attention …l’émotion est présente. L’histoire de cette femme qui raconte sa propre vie à son fils de 15 ans questionne …. La fin est un peu énigmatique…Quelle influence le passé a-t-il sur les enfants ???
QUEFFELEC Yann « LA MEDUSE NOIRE » Cl Ch, Calmann-Lévy, Août 24, 279p, 20,90 euros. 1962, 20 ans à peine, il sort de la guerre d’Algérie et débarque à Marseille. Au lieu de prendre le train qui le ramènera à la demeure familiale dont son père l’a chassé, il prend le train de Paris, rencontre l’amour, les années passent… la découverte d’une inquiétante pustule ruinera-t-elle ses espoirs de carrière artistique et de réconciliation familiale. Invraisemblable, mal raconté, raté….
QUENTIN Abel « Cabane » Les Ed. de l’Observatoire, 8/2024, 477p, 22€ (Milène THONY) Quatre scientifiques : un couple d’américains, un français, un norvégien à qui on demande une étude. Analyser les causes et les conséquences à long terme de la croissance sur la démographie et sur l’économie mondiale. A l’aide d’une puissante machine IBM, après un an, ils rendront leur constat : l’effondrement de la civilisation en 2050. Le rapport 21 deviendra un succès mondial en 1973 mais fut jugé exagérément alarmiste. Il fut demandé une contre-expertise. Vingt après, les
anticipations s’étaient révélées exactes. Aujourd’hui la seule chose que nous puissions faire, c’est de nous préparer à encaisser le choc … N.B. Librement inspiré du Rapport Meadows – Les Limites de la croissance – 1972. Impressionnant roman qui fait frémir. Niv 1. Sélection Renaudot
REDONDO, Dolores- « En attendant le déluge » -Ed. Gallimard – 08/24- 544p-21 €- Annette FAVIER Glasgow,1983 ; L’Inspecteur Noah SHERRINGTON est sur le point de coincer un serial killer qu’il poursuit depuis des années, Bible John. Mais lors d’une interpellation mouvementée, l’Inspecteur est foudroyé par une crise cardiaque qui le laisse pour mort pendant que sa proie s’enfuit. Mais à peine remis malgré tout, l’enquête reprend. Ce tueur de femmes se réfugie à Bilbao, mais les inondations d’août 83 vont faire encore basculer la traque. Un thriller tumultueux, jouant avec les dérèglements du cœur et de la météo. À acheter !
SIRE guillaume « Les Grandes Patries étranges » Calmann-Lévy, 8/2024, 348p, 21,90€ (Milène THONY) Son père mort à la guerre, Joseph et sa mère Thérèse partent vivre sur l’île de Tounis, sur la Garonne à Toulouse. Joseph, hypersensible sait d’instinct si une femme est enceinte. Il perdra connaissance, fou amoureux, en découvrant Anima qui joue du piano comme une fée. Thérèse fait le ménage dans le bordel « La Chapelle » tenue par une maquerelle espagnole qui est l’amie du père André, curé ancien rugbyman … Histoire loufoque avec un cochon puant qui sert d’animal de compagnie à Anima. L’auteur habite Toulouse et s’est régalé à dépeindre sa ville. Roman un peu déjanté quand même ….
TOIBIN, Colm « Long Island » – Ed Grasset-08/24 -397 p. 22 €- Annette FAVIER. Ellis Fiorello, installée dans la banlieue de New York, est l’épouse d’un plombier d’origine italienne. Elle vient d’Irlande et nous avons en fait appris son histoire d’expatriée dans le précédent Brooklyn. La vie n’est pas toujours rose car toute la famille de son mari est fort envahissante. De plus elle apprend que son mari a fait un enfant à une de ses clientes. Prenant prétexte de cette infidélité, elle décide de partir fêter les 80 ans de sa mère en Irlande car elle ne l’a pas vue depuis 20 ans. Ses enfants suivront. Les retrouvailles ne sont pas idylliques… Jusqu’au moment où elle rencontre Jim, son amour de jeunesse, et Nancy, sa meilleure amie autrefois. Jim, pourtant presque fiancé à Nancy, retrouve le même attachement qu’autrefois pour notre héroïne. La fin se termine vraiment en queue de poisson, que deviendront-ils tous les trois ? TOIBIN est très doué pour décrire les sentiments de tous ses nombreux protagonistes, mais peut-
être fait-il preuve d’une certaine froideur en les abordant ? Mais il a un tel talent pour décrire aussi bien les caractères ! Et pour aller de situations en situations que vous découvrirez petit à petit ! Sélection Fémina étranger.
VENTURA Maud « CELEBRITE » Cl CH, L’Iconoclaste, Août 24, 531 p 21,90€. A 4 ans déjà elle voulait être une star mondiale, mais elle s’aperçoit vite que la célébrité est le contraire du bonheur. Récit d’une ascension féroce et brutale. Un portrait acide et brillant de notre époque (4° de couverture) Niveau 1, à acheter.
VINGTRAS Marie « LES AMES FEROCES » EDITIONS DE L’OLIVIER, août 2024, 267 pages, (Monique Mazzucchi) Dans une petite ville sans histoire des États Unis, on retrouve dans une rivière, décédée d’un coup violent à la tête, Léo, une adolescente sans histoire. Le shérif, femme, homosexuelle, vivant ouvertement avec sa compagne est chargée de l’enquête. Les personnages auxquels Marie VINGTRAS donne vie (Léo, Emmy, Benjamin, Livia, Seth etc..) sont passionnants, torturés, parfois effrayants mais ne laissent jamais indifférent. Chacun à tour de rôle livrera son histoire et sa vérité jusqu’au dénouement final. J’ai beaucoup aimé ce livre, qui débute comme un policier, mais à mon sens n’en est pas vraiment un. A acheter Niveau1.
VINGTRAS Marie « Les Ames féroces » (Milène THONY) J’ai beaucoup aimé la 1ère partie du roman, le shérif qui est une femme baraquée comme un homme, très perturbée par sa compagne qui la harcèle pour avoir un enfant d’elle ! Les trois voix des personnages suspectés dans la seconde partie du roman sont effrayantes de noirceur. A écrit Blizzard, 2021, Prix des Libraires.
ZALAPI Gabriella « Ilaria ou la conquête de la désobéissance » Zoé, 8/2024, 174p, 17€ (Milène THONY) Un père qui ne se remet pas de son divorce, enlève sa fille de 8 ans pour une très longue cavale, de Turin jusqu’en Sicile, d’hôtel en hôtel, pendant 2 ans !!! En donnant des nouvelles par tél à son ex-femme. Il met sa fille en pension, sans aller la voir pendant 7 semaines. Il boit tout le temps même en conduisant. Ils auront un accident. Côté finances, il vend des bijoux en or retirés aux objets trouvés, en jurant qu’ils sont à lui …Histoire incroyable, expérience terrible vécue réellement par l’auteur plasticienne. Ahurissant mais formidablement bien écrit. Niv. 1. Sélection Fémina, Médicis.
RECIT
MONTAIGU Thibault de « Cœur ». Éd. Albin Michel. 327 p. 21,90 €. (Céline DOEBBELS) Il est sélectionné pour le prix Goncourt, le prix Goncourt des lycéens et le prix Renaudot. En 2020, Thibault de Montaigu a reçu le prix de Flore pour « la Grâce », livre dans lequel il raconte la conversion d’un de ses oncles passé d’une vie de débauches homosexuelles à une entrée chez les Franciscains où il aura de hautes fonctions. Dans « Cœur », Thibault de Montaigu continue de prendre sa famille comme sujet. Son père, en fin de vie, lui demande d’écrire sur un ancêtre mort en 1914 et selon la tradition familiale en héros. En effet, saint-Cyrien, il est dit qu’il fut le héros de ce qui est considéré comme la dernière grande bataille de la cavalerie de l’histoire guerrière. La vérité historique ne sera pas à la hauteur de la légende familiale. Tout le long de son récit, Thibault de Montaigu nous raconte sa famille de la fin du XIXème à nos jours. Mais l’important dans cette œuvre que l’on ne peut appeler roman, ce sont les mots : honneur, gloire, respect, courage, mots que l’on « trimbale » d’une génération à l’autre. Ils sont la force d’une tradition mais lient quelque fois lourdement aux relations quotidiennes, familiales ou amicales. Livre très agréable à lire.
Aura-t-il un prix ?
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